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La philosophie, 22 août 2015

août 22, 2015

 

On taxe souvent la philosophie et leurs adeptes d’être dans les nuages; cela me choque d’entendre de tels propos.

Je me souviens d’avoir replacé dans le bon sillon, le jugement de mes enfants qui dénigraient leurs cours de philosophie: je leur avais alors dit de les prendre au sérieux, car ils leur serviraient toute leur vie et même dans leur futur emploi, quel qu’il soit. J’espérais qu’ils aient de vrais bons professeurs.

La philosophie a toujours été pour moi simplement l’amour de la sagesse; mais, rechercher cette sagesse a aussi été un appel à l’amour, celui de m’aimer d’abord, de bien m’aimer, c’est-à-dire d’apprendre à me respecter, m’accepter dans mes limites tout en essayant de les surpasser pour être en mesure de bien respecter chacun.

Évidemment, je n’ai pas compris ça enfant, ni à l’adolescence: ce n’est qu’une fois adulte et confronté à l’absurdité de la vie et de la mort et à l’abus de certaines autorités, que la sagesse de l’amour à fait graduellement son entrée dans ma conscience. Grâce à l’amour de la sagesse, j’ai découvert son corollaire: la sagesse de l’amour. Tout ça, pour mieux conjuguer l’injustice universelle.

Voici un court texte issu du colloque annuel du philosophe Jean Bédard à Bic au Québec les 7, 8 et 9 août 2015:

Pour une méta-écologie
« […] Cette « méta-écologie » intégrera nécessairement la puissance spirituelle de l’homme, seule capable d’assurer la paix dans la nature et parmi les hommes… Voici venu le moment d’établir l’approche à la totalité en y intégrant l’esprit ; car seule la dimension acquise par les sages et les saints permettra de réussir au dur examen de passage qui est devant nous, et que nous allons devoir aborder au cours des prochaines décennies… Oublier que l’homme est doué de potentialités spirituelles pour le réduire à ses seules dimensions « naturelles », économiques et sociales est une erreur absolue. Une erreur et une horreur. Une nouvelle éthique s’impose, celle de cette écologie spiritualiste, de cette méta-écologie, seule voie ouverte sur le futur, qui intègre aux acquis des grands courants religieux et spirituels ceux plus récents de l’écologie.. »

Extrait de Jean-Marie Pelt Au fond de mon jardin, Fayard. Cité dans Comte-Sponville, A., A. Jacquard, T. Monod and J.-M. Pelt (2006) (2002). Écologie et spiritualité. Paris, Albin Michel.p. 11

La présentation de la méta-écologie (ou ce que nous devrions tous comprendre ou saisir par notre capacité d’entendement sur la nécessité du respect à accorder à la nature) me rappelle que je suis un animal qui domine tous les autres animaux. Je dois donc les respecter tout en sachant fort bien qu’aucun animal ne se donne le devoir que l’humain n’arrive pratiquement pas à assumer: la paix sur cette planète.

La guerre et l’abus de pouvoir sur l’autre sont monnaie courante entre tous; tous les animaux sont des prédateurs d’animaux plus vulnérables: nous sommes toutes et tous les festins des autres!

L’écologie et sa méta-forme doivent se comprendre dans l’équilibre des forces: si l’humain domine, son déséquilibre qualitatif et quantitatif d’aujourd’hui ne fera qu’accélérer son autodestruction. Entre temps, la qualité de la vie de toutes les races humaines se détériore malgré toutes les tentatives écologiques.

Oui, nous sommes tous la nourriture de l’autre, rien de moins, mais aussi rien de plus! Vouloir « assurer la paix dans la nature et parmi les hommes » est méritoire et grand, encore faut-il que ce soit possible; or, même si une utopie est ce qui n’est pas encore réalisé (Théodore Monod), celle-là n’en est pas une, car elle est irréalisable, sauf si nous apprenons tous à nous aimer et si nous devenons tous plus que frugales, et encore…

Trop nombreux sommes-nous de plus en plus sur cette petite planète, l’espace vital et les ressources nécessaires à la vie de chacune et chacun manquent désespérément et crés l’injustice au lieu de la paix et les jours heureux souhaités. Les « boat people » se multiplient et la pauvreté ne fait que croître par la force des choses: le déséquilibre que le nombre de cerveaux humains sur cette planète cré, ne fait qu’augmenter et le stress à la vie aussi. Résultat: une augmentation disproportionnée de la violence et de la mort. Des animaux disparaissent, leur habitat naturel aussi; l’Homme prend toute la place jusqu’au cannibalisme.

Oui, nous pouvons chercher la sagesse à notre réussite de la longévité de vie de l’animal humain, mais sans amour entre nous tous, peine perdue, car l’absurdité de cette longévité n’a de sens qu’en l’amour et la fin inéluctable qu’est la mort de tout.

Seul l’amour entre nous tous (humains et nature) pendant que nous sommes en vie permet de donner un sens à cette vie, à cette existence de la nature et nous, animal humain, tout en sachant mourir et faire mourir cette nature qui se régénère dans les fruits de la mort.

Les mystères de la vie et de la mort ne pourraient se comprendre que dans cet apprentissage à l’amour et à la mort: aimer soi et chacun jusqu’au trépas respectueux de tout un chacun.

La vie n’est pas éternelle; c’est probablement la mort qui l’est. C’est peut-être pour ça que notre poète et chansonnier Félix Leclerc disait que c’était grand la mort, que c’était plein de vie dedans!

Sans nourriture pour nos estomacs, il n’y a plus aucune question existentielle importante qui ne tienne!

La grande qualité humaine de la leçon de l’Athénien Socrate qui nous a enseigné l’ignorance et l’équilibre, est celle de l’humilité: reconnaître qu’on ne sait pas, confirme notre humilité d’être, tout en reconnaissant notre pouvoir de chercher, un pouvoir humble, mais sincère, de tenter de comprendre l’existence, le pourquoi des choses de la nature, tout ça, sans aucune prétention. Faire son possible devient donc l’impératif, le défi philosophique que chacune et chacun doivent intérioriser pour et par l’actualisation de ses capacités individuelles: l’individualité de chaque personne prend ainsi toutes les couleurs du spectre solaire! Toujours pour son propre bénéfice et celui de la multitude; humblement, amoureusement, raisonnablement.

L’important demeure de créer une spirale inflationniste de respect de soi et des autres, c’est-à-dire ensemble, de paire: péniblement au début, certes, mais possiblement à la longue, à mettre en marche afin que son mouvement positif entraîne le tout à sa suite.

Mais dans notre monde d’aujourd’hui, dans ce monde de l’hyper performance, de la quasi-perfection recherchée, même le respect de soi reçoit une très mauvaise note et fait très mauvaise presse. L’individualisme se qualifie alors d’égoïsme, alors qu’il devrait être vu d’abord comme l’accomplissement de soi, accepter sa personne et prendre ses responsabilités pour une actualisation de son être et de ses talents au bénéfice de la multitude.

Rien de mal de prendre graduellement confiance en soi pour sortir de sa bulle, sortir de ce nombril si important, et découvrir comme il est gratifiant de se réaliser en donnant à sa communauté, en redonnant à celles et ceux qui ont donné, qui nous ont donné ou qui ont besoin.

Rien de spectaculaire dans ce métier du don, dans cet esprit du don, dans ce retour à l’autre, ce retour vers l’autre, sans trop de reconnaissance explicite, mais la réalisation d’une maturité, d’une actualisation de notre être, de tous nos talents, de notre humanité intelligente.

Le temps joue un rôle déterminant dans cette recherche de réponses aux questions existentielles; quand un fruit est mûr, il faut le savourer; trop tôt ou trop tard, il n’a pas les mêmes valeurs nutritives. Ainsi va la nature: elle demande un temps d’évolution pour donner ses valeurs, lesquelles seront différentes d’une étape à l’autre. À la mort du fruit, quel qu’il soit, son fumier, sa pourriture, représentera encore une nouvelle valeur de laquelle il faudra trouver une réponse nourricière.

L’important n’est pas LA réponse à ces questions existentielles, mais bien MA réponse à celles-ci. Celle-ci doit favoriser mon équilibre, mon humilité et ma participation altruiste à cette existence. C’est mon intérêt.

Avec « La compagnie des philosophes » , j’ai découvert que j’étais un matérialiste; rien de plus et rien de moins. Dans mon métier dans le réseau de la santé du Québec, cette philosophie du matérialisme se concrétise chaque jour, et il y a quelques années maintenant, j’ai favorisé une réflexion provinciale (et maintenant nationale) sur le débat qui semble aboutir dernièrement dans une aide médicale à mourir.

Personne ne veut mourir: moi le premier, je veux vivre éternellement! Mais voilà; l’éternité, si elle doit être vivante, il faut alors présumer qu’elle ne sera pas sous notre forme corporelle puisque c’est sous la forme de poussière, qu’une fois décédés, nous verrons bien tomber en décrépitude cette merveille de spiritualité, d’intelligence et d’entendement. Bien sûr que comme disciple de Socrate, je demeure ignorant, mais alerte (encore, par chance) à la découverte de réponses aux mystères. Qui sait?

Nous gardions depuis 3 jours nos petits-enfants, ces merveilles de la nature humaine! Doris, mon épouse, fait aussi des merveilles, réalise des moments d’amour incroyables pour eux deux. Mais conserveront-ils leur intégrité physiologique qui les rendront, chacun, des êtres accomplis et d’une pleine sociabilité? Rendront-ils à la société l’amour qu’ils auront reçu de cette personne si généreuse et de leur parent? Rien n’est encore joué, car la rude période de l’adolescence reste à conjuguer par les parents (et nous, peut-être) afin de maintenir cet équilibre émotif précaire (actuel et à venir), mais vital.

Les fondements semblent bons et bien partis, mais il y a encore des matériaux à bien ajuster pour que la maison humaine respective de ces deux petites merveilles atteigne cette maturité fonctionnelle d’un plein épanouissement. Je veux vivre en santé jusqu’à 102 ans pour aider (et surtout ne pas nuire) à cette réalisation, dans mes modestes possibilités: humblement.